Panique

Julien Duvivier

Avec Viviane Romance (Alice), Michel Simon (Monsieur Hire), Paul Bernard (Alfred)

Noir et blanc - 1946 - DVD

L'intrigue

L’intrigue : Les forains s’installent dans une ville de la banlieue de Paris et découvrent le corps d’une habitante du quartier que l’on vient d’assassiner. Au même moment, Alice sort de prison et retrouve Alfred, son amant. Les habitants de la ville se persuadent de la culpabilité de Monsieur Hire, un marginal, solitaire qui tombe sous le charme d’Alice. Hire suscite la haine de tous. Alice comprend le parti qu’elle peut en tirer et fait accuser Mr Hire pour innocenter son amant. La foule se déchaîne et Hire échappe de justesse au lynchage. Il se réfugie sur le toit d’un immeuble, tombe et se tue. La police trouve près de lui la preuve qui accuse le vrai coupable.

  • Le lynchage

  • Viviane Romance

  • Viviane Romance et Paul Bernard

  • Viviane Romance

  • Miche Simon et Viviane Romance

  • Michel Simon

  • Michel Simon, Le lynchage

  • Michel Simon

  • Michel Simon

  • Affiche: Panique (1946)

  • Affiche: Panique (1946)

  • Affiche: Panique (1946)

  • Julien Duvivier

"France rance" ou "France moisie"

« Panique » est un film de 1946. C’est l’un des meilleurs films de Duvivier. Le scénario écrit par Charles Spaak et Julien Duvivier est tiré d’un roman de Simenon (1933), intitulé : « Les fiançailles de Monsieur Hire ». Ce film de l’immédiat après guerre décrit le climat délétère de la France sous l’occupation.

Après quelques films réalisés aux Etats-Unis, Duvivier tourne « Panique » aux studios de la Victorine à Nice avec des moyens considérables. Pour le Duvivier de 1946, rien n’a changé depuis « La Bandera » et les années trente. La guerre n’aura été qu’un intermède sans conséquences. Jacques Lourcelles décrit Duvivier comme un « anti-Renoir ». Il écrit à propos de « La Bandera » réalisé en 1935 : « Une œuvre quasi morbide où le pessimisme de Duvivier (…) s’ingénue à portraiturer avec une jubilation sauvage un petit groupe d’êtres retirés du monde des vivants et déjà passés du côté de la mort ». (…) Duvivier exprime sous couvert de fidélité à une oeuvre littéraire, ses fantasmes noirs et ses démons personnels » (( JACQUES LOURCELLES, « La Bandera »,  Dictionnaire du cinéma, Paris, Editions Robert Lafont. 1992. Pages 124/125 )). Duvivier renoue avec la noirceur qu’il affectionne et accentue le style réaliste qui le caractérise jusqu’à l’artifice. Il ne s’agit plus de personnages en lutte pour leur survie et accablés par un destin tragique, mais de la monstration d’une exécution programmée et du plaisir morbide à regarder se débattre des personnages condamnés d’avance. D’un côté, la foule, la masse de la populace, stupide, veule et méprisable et de l’autre des victimes, candides, aveugles, perdues et broyées par les règles d’un jeu auquel elles ne comprennent rien et qui sont lâchées dans le film comme des proies désignées. On voudrait bien essayer de racheter Alice et Alfred, les héros perdus de cette terrible aventure, mais Spaak et Duvivier s’acharnent sur eux avec une telle hargne qu’ils finissent par lasser le spectateur à force de lâchetés et de veulerie. Seul Michel Simon parvient à tirer son épingle du jeu, même s’il est un peu à l’étroit dans le costume de Mr Hire.

Le cinéma de Duvivier tient dans une formule, celle que répète inlassablement l’obsessionnel. L’avenir n’a pas de sens puisque le passé a raté et que le présent en est la preuve. Lacan utilise à propos de Chateaubriand une formule qui s’applique aussi au cinéma de Duvivier: « Il a une façon de défendre les principes (…) qui est la meilleure façon de les anéantir ». (( JACQUES LACAN, Le moi dans la théorie de Freud et dans la technique psychanalytique, Paris, Edition du Seuil, Coll. Le champ freudien, 1978, page 235 ))

Reste que Duvivier est un cinéaste considérable parce qu’il fait le pont entre les débuts du parlant et le cinéma d’aujourd’hui. C’est l’un des cinéastes qui permet d’appréhender et de considérer cette « nébuleuse d’idées », cette « idéologie » diraient certains, si particulière, si française, qui a eu court dans notre pays dans les années trente et qui a perduré jusque dans les années cinquante avant d’être définitivement démonnaitisée en 1968 et que l’on évoque encore régulièrement à propos de la sortie d’un film ou d’un livre. Je pense à la formule polémique et lapidaire de Sollers, « France rance » ou « France moisie» parfois utilisée imprudemment par de jeunes critiques.