La bataille d’Alger

Gillo Pontecorvo

Avec Avec Brahim Hajadj (Ali la pointe), Jean Martin (le colonel Mathieu), Yacef Saadi (Djefar, Saadi joue son propre rôle), Mohammed Beghdadi (Larbi Ben M’hidi), Mohammed Ben Kassen (Petit Omar), Fouzia El Kader (Halima), Samie Karbash (Une des filles du réseau bombes)

Noir et blanc - 1966 - DVD

L'intrigue

En 1956, le FLN (Front de libération nationale) lance une campagne d’attentats et d’exécutions contre les policiers et la population civile algéroise. En janvier 1957 les parachutistes de l’armée française investissent la ville pour démanteler l’organisation du FNL. Début 1958, l’armée semble gagner la bataille d’Alger. Le 2 juillet 1962, l’Algérie devient indépendante.

  • Jean Martin (colonel Mathieu dans le film, colonel Bigeard pendant les faits)

  • Le petit Omar et Brahim Hadjadj (Ali la pointe)

  • Paras défilant dans Alger (document d'archive)

  • Samia Kerbash (une activiste qui passe un barrage)

  • Yacef Saadi le jour de son arrestation

  • Brahim Hadjadj (Ali la pointe)

  • Brahim Hadjadj (Ali la pointe)

  • Brahim Hadjadj (Ali la pointe) et Gillo Pontecorvo

  • Brahim Hadjadj (Ali la pointe)

  • La Bataille d'Alger (l'affiche)

Une rencontre différée

Gillo Pontecorvo est un metteur en scène italien, juif et communiste, issu d’une famille d’intellectuels qui débute au cinéma à la fin des années cinquante. Il réalise le film Kapo (1960) avec Emmanuelle Riva, dont l’intrigue se passe dans un camp de concentration et remporte l’oscar du meilleur film étranger à Hollywood en 1961. Le film est resté célèbre en France du fait d’une critique acerbe de Jacques Rivette dans « Les Cahiers du Cinéma » intitulée De l’abjection qui reprochait à Pontecorvo d’avoir suscité une émotion facile et vulgaire indigne de son sujet : Voyez dans Kapo, le plan où Emmanuelle Riva se suicide en se jetant sur les barbelés électrifiés: l’homme qui décide à ce moment-là de faire un travelling avant pour recadrer le cadavre en contre-plongée en prenant soin d’inscrire exactement la main levée dans un angle de son cadrage final, cet homme-là n’a droit qu’au plus profond mépris. ((Jacques Rivette, Les Cahiers du Cinéma, n°120, Juin 1961. L’affaire paraît bien innocente aujourd’hui dans notre monde encombré d’images, mais elle a profondément marqué les cinéphiles comme en témoigne l’article de Serge Daney, écrit plus de trente ans après :http://www.pileface.com/sollers/IMG/pdf/Le%20travelling%20de%20Kapo%20par%20Serge%20Daney.pdf )). « L’affaire du travelling de Kapo » est restée présente dans les mémoires des cinéphiles et dans celles de générations de scénaristes et de cinéastes qui ne se sont plus risqués à mettre en scène la Shoah et les tragédies de l’histoire sans redouter l’effet « Kapo ». L’article de Rivette a été l’occasion d’une amorce de réflexion sur les rapports entre liberté de création et morale ((Lire l’article de Jean-Marie Pottier sur Slate : http://www.slate.fr/story/113377/travelling-kapo-rivette-shoah)). On peut s’interroger sur le fait que la poursuite de ce débat, de cette dispute sur les conditions de présentation des faits historiques au cinéma inaugurés avec l’article de Rivette ait été rendue impossible et se soit transformé en interdit, voir même en tabou (Je fais ici référence à la citation de Godard Le travelling est affaire de morale ou à celle de Jean-Claude Biette La morale est affaire de travelling.) qui a littéralement « congelées » plusieurs générations de cinéastes. Ce n’est que tout récemment avec le film de Laszlo Nemes « Le fils de Saül » et le revirement critique bienheureux de Claude Lanzmann qui adoube le film et son réalisateur que l’affaire du « travelling de Kapo » est redevenue d’actualité.
Après-coup, des années après les faits, l’affaire du « travelling de Kapo » suscite une question : l’article de Rivette a-t-il suscité et provoqué le débat ou l’a-t-il empêché ? Il l’a sans aucun doute permis puisque qu’il en pose les termes, cependant on ne peut que constater et s’étonner du fait que la Shoah, la guerre d’Algérie et d’autres évènements tragiques de l’histoire récente de notre pays soient si peu présents dans les films réalisés par les cinéastes de la génération des années cinquante et soixante et ne deviennent jamais, ou trop tardivement des sujets de films pour les cinéastes de la Nouvelle Vague. ((A l’exception notable de quelques films toujours cités pour ce qui concerne la guerre d’Algérie : Les parapluies de Cherbourg (1964) de Demy, Le petit soldat (1960) de Jean Luc Godard ainsi que le film d’Alain Cavalier L’insoumi (1962) interdit, censuré et amputé à sa sortie (la liste n’est pas exaustive). Il faut signaler cependant que François Truffaut et Alain Resnais sont parmi les premiers à signer le manifeste des 121 : la déclaration sur le droit à l’insoumission pendant la guerre d’Algérie en 1961 : https://fr.wikipedia.org/wiki/Manifeste des 121)). La politique des auteurs qui mettait l’accent exclusivement sur l’invention et la créativité de la mise en scène au détriment de l’histoire et du sujet du film explique sans doute cette absence.
Disons le tout de go : Il n’y a pas de « rapport » au sens de mise en relation, entre travelling et morale. Le travelling est l’affaire du machiniste et la morale celle des humains. Les aphorismes de Godard et Biette qui mettent en rapport morale et travelling sont des trouvailles poétiques qui établissent un rapport entre deux termes qui ne sont pas sur le même plan. Le travelling n’est pas plus affaire de morale que le couteau celle du crime. Ces aphorismes confondent sens et effet de sens. Ils font la promotion d’un court-circuit à la manière d’un mot d’esprit. Si le plan du film de Pontecorvo ne convient pas, le travelling n’y est pour rien, c’est la mise en scène, le regard, le point de vue de Pontecorvo qui posent problème.
L’affaire en serait restée là si Pontecorvo n’avait pas continué à faire des films et si la question du rapport entre les évènements historiques et l’actuel n’avait pas été au centre d’un des films les plus remarquables et les plus malmenés réalisé dans les années soixante : La bataille d’Alger. Ce film est né d’une succession de rencontres : celle de Pontecorvo et de son scénariste Franco Salinas avec Yacef Saadi, un activiste algérien membre du FLN : celle du peuple algérien avec les héros et les acteurs de son histoire en train de s’écrire dans la suite de l’Indépendance : mais aussi la rencontre entre l’Europe, plus particulièrement l’Italie, et le Maghreb. Le film fut aussi, et c’est le sujet de cet article, l’occasion d’une rencontre manquée entre la France et l’Algérie.
L’aventure singulière de ce film, son tournage et surtout sa réception en France sont emblématiques des rapports impossibles qu’entretiennent la France et l’Algérie depuis les début de leur histoire commune. Quelque chose ne passe pas entre ces deux pays qui rejouent sans cesse la même scène sur le même mode revendicatif et identitaire pour l’un et celui de l’incompréhension coupable et agacée pour l’autre. Les films qui se préparent et les livres qui s’écrivent aujourd’hui sur le sujet laissent supposer que deux générations plus tard, soixante ans après l’indépendance, la répétition enfin varie. Le « quelque chose » qui ne passait pas se présente autrement et de nouvelles perspectives apparaissent.
Que s’est-il passé entre la France et l’Algérie pour que des rapports si complexes ambivalents et instables prévalent dans la relation entre ces deux pays ? Il n’est pas question dans cet article de refaire l’histoire de la colonisation de l’Algérie, mais je vous propose d’entendre deux points de vue singuliers sur le sujet. Celui d’Elisabeth Roudinesco qui, expliquant le racisme à partir du concept de race, concept scientifique erroné et inventé au XIXe, décrit la spécificité de la colonisation de l’Algérie : Les deux grands empires français et anglais, ont colonisé les peuples de manière différente, mais avec cette idée d’infériorité des races. Le colonialisme anglais installe la différence de race d’emblée, mais il ne prétend pas civiliser les peuples qu’il colonise, il y a une séparation, un apartheid. Alors qu’en France, le colonialisme français s’est inspiré de l’universel des droits de l’homme pour expliquer la mission civilisatrice de la France; coloniser c’était donc intégrer, assimiler. Ce qui veut dire que dans la mission civilisatrice de la France, les droits de l’homme se sont retournés en leur contraire. (( Séminaire d’Elisabeth Roudinesco: Psychanalyse, genre, colonialisme: la question identitaire, séance du 5 janvier 2021, inédit )).
Bouda Etemad, Professeur à Lausanne et chercheur en histoire économique a écrit sur la colonisation. Plutôt que d’axer ses recherches sur la causes du colonialisme ou ses conséquences, il s’est attaché à déterminer les moyens utilisés par l’Occident pour conquérir le monde. Il fait une pesée des moyens et des coûts des empires et dresse une étude comparée entre les différents modèles coloniaux : L’Algérie ne rappelle pas les pures colonies de peuplement d’Amérique du Nord (Canada, États-Unis) et d’Océanie (Australie, Nouvelle-Zélande). Elle restera jusqu’à la décolonisation une colonie mixte où cohabitent deux populations numériquement inégales. Ce qui la rapproche plutôt du cas sud-africain. (…) Elles seraient devenues de véritables colonies de peuplement si les populations européennes, comme en Amérique du Nord ou en Océanie, l’avaient emporté numériquement sur les populations indigènes. Comme il se passa le contraire, les privilèges des minoritaires européens étaient condamnés à disparaître à terme face aux revendications de la masse des populations autochtones. ((Bouda Etemad, La possession du monde, Edition Complexe, 2000, page 222.))
La conquête de l’Algérie par la France commence en 1830. Elle est tragique, sanguinaire, longue, difficile, couteuse et violente. La guerre d’Algérie débute en 1954 et l’indépendance est conquise ou concédée en 1962. C’est une guerre qui a été gagnée par les militaires sur le terrain et perdue politiquement sur la scène internationale, d’où le ressentiment qu’elle suscite. C’est une guerre de trop qui vient après la débâcle de 1939, la défaite militaire en Indochine (1954) et l’humiliation du retrait contraint du canal de Suez (1956). C’est aussi et surtout une tragédie et un arrachement pour les Français d’Algérie devenus des étrangers dans le pays qui les a vu naître et qui sont rapatriés en métropole dans la précipitation et le plus grand dénuement.
En 1957 Yassef Saadi, un personnage important au sein du FNL, responsable militaire de la zone d’Alger et de la lutte qui se mène dans la Casbah d’Alger (le quartier « arabe », populaire et historique de la ville) est arrêté par les paras français et emprisonné en métropole. Il ne participe pas à la fin de la bataille d’Alger, mais libéré en 1962 au moment de l’indépendance, il écrit un projet de film sur la bataille d’Alger qu’il propose à Pontecorvo qui avait commencé l’écriture d’un scénario sur le conflit Algérien qu’il s’intitulait Paras. Saadi et Pontecorvo s’entendent et conçoivent ensemble le scénario de La bataille d’Alger écrit avec le scénariste Franco Solinas. Saadi revient ensuite à Alger pour tenter d’obtenir de l’aide du nouveau gouvernement algérien. Le FLN a remporté la victoire et gagné le guerre, mais le gouvernement de la nouvelle Algérie indépendante est l’objet de luttes intestines violentes. Saadi reste un personnage influent et redouté. Il affirme haut et fort qu’il ne s’intéresse plus à la politique et qu’il veut faire du cinéma. Il rencontre Ben Bella qui lui donne 400 millions de francs, une somme considérable à l’époque, qui correspond à 80% du budget du film pour la réalisation de son projet. Mohamed Harbi ((Ancien haut fonctionnaire, historien et universitaire algérien, spécialiste de l’histoire de l’Algérie et qui apparaît dans le documentaire qui m’a servi de source pour cet article : La bataille d’Alger, un film dans l’histoire de Malek Bensmaïn, (2017), disponible sur Tenk.)) analyse ainsi l’évènement : Saadi était candidat à la direction de la gendarmerie. Pour Ben Bella, il n’en était pas question, donc il y a eu l’idée de lui donner une compensation. (…) Il était à la tête d’un important groupe armé, il fallait quand même lui donner quelque chose.
Le tournage commence, les scènes d’insurrection sont réalisées avec l’appui de l’armée algérienne et des Algérois. L’histoire n’est pas pour autant mise en parenthèse. Pendant le tournage, Houari Boumédiène organise un coup d’état et renverse le gouvernement de Ben Bella. A Alger, tous les habitants sont informés des détails du tournage, aussi lorsqu’un matin les comédiens se rendent à leur travail et découvrent les chars déployés dans la ville, ils pensent être arrivés sur le plateau du tournage, mais les chars n’étaient pas les chars du tournage, c’était les chars du coup d’état (( Cité par un technicien dans le documentaire qui m’a servi de source pour cet article : La bataille d’Alger, un film dans l’histoire de Malek Bensmaïn, (2017), disponible sur Tenk.)). Autre anecdote, le comédien qui, dans le film, doit jouer le rôle de l’étudiant torturé par les militaires français, est suspecté de sympathie communiste par la police algérienne, il est enlevé pendant le tournage, emprisonné et torturé dans les même lieux que ceux utilisés quelques mois plus tôt par les paras français.
Le scénariste, Franco Salinas a pesé de tout son poids pour que les scènes d’attentats contre les civils organisés par le FNL soient intégrées au film. Bien que financé par l’Algérie, le film ne dissimule rien de la violence des actions du FLN. Les scènes de torture pratiquée les parachutistes français sont montrées dans toutes leur brutalité et les propos tenus par le colonel Mathieu qui joue le rôle du colonel Bigeard sont sans concession, mais jamais caricaturaux et décrivent avec beaucoup d’intelligence et de finesse le point de vue des militaires. C’est un film étonnamment équilibré qui fait le récit de cet évènement tragique avec justesse et mesure.
Le film terminé est sélectionné et présenté au Festival de Venise. Robert Bresson (Au hasard Baltazar), François Truffaut (Fahrenheit 451), Agnès Varda (Les créatures) et Roger Vadim (La curée) sont également en compétition. La délégation française a un mouvement d’humeur quand le film de Pontecorvo reçoit le Lion d’or et elle quitte la salle. Dicci Pontecorvo la femme de Gillo Pontecorvo raconte : Gillo a gagné le Lion d’or face à tous les Français qui sont sortis de la salle. Les Français ont dit que c’est très grave que le film soit récompensé. (…) Le film a ensuite été interdit en France. Jean Narboni était présent comme journaliste pour les Cahiers du Cinéma : Je ne comprenais pas qu’on puisse dire : voilà un film anti-français. L’indépendance avait eu lieu en 1962 et nous étions en 1966… et le film n’arrivait pas à être montré. Le film d’abord interdit sort brièvement en 1970 puis est retiré des écrans à la suite de menace d’attentats, il sort en 1971 mais en raison de nouvelles menaces restera censuré jusqu’en 2004. Situation d’autant plus étrange que le film devient l’un des symboles de la libération du peuple algérien, qu’il est vu et apprécié partout ailleurs dans le monde.
Daho Djerbal, historien : Qu’est-ce qui s’est passé avec le film de Pontecorvo? On montre en gros que la lutte des Algériens pour se séparer de la France et que les moyens mis en œuvre étaient légitimes… peut-être pas justifiés, mais légitimes. (…) Pendant la guerre d’Algérie, deux millions de Français ont été appelés et ont fait ce qui a été fait ici. Et ça c’est insupportable… ((Ibid.))
Mohamed Baghadi, leader de la lutte armée, analyse ainsi le film et son impact : Ecoutez ce que dit Ali la pointe ((Activiste engagé par Saadi Yacef pour défendre la Casbah d’Alger qui a été repéré et exécuté par les parachutistes français. Il est devenu le symbole et l’icône de la lutte pour l’indépendance.)) dans le film : Pour vaincre, il faut surmonter les obstacles, mais c’est après l’indépendance que les grandes difficultés apparaîtront. Ce sont des paroles prémonitoires. Ali la pointe dit ce que les peuples vont endurer dans tous les pays colonisés, (.. .) C’est la lutte de tous les peuples opprimés à qui on a tendu un piège. C’est cela que porte ce film. C’est un film annonciateur. ((Ibid.))
Aujourd’hui, plus de soixante ans après les faits, on est loin d’en avoir terminé avec la question coloniale. Pour quelles raisons ce passé longtemps enfoui, ignoré, refoulé est-il convoqué dans l’actuel? Tout simplement parce que le temps a passé et que les interdits et les tabous le concernant peuvent être levés. De jeunes générations d’étudiants et de chercheurs s’emparent des questions coloniales, de celles de l’esclavage, de la race et du racisme et les mettent au travail dans le cadre de leur recherche à l’université ou au CNRS. Ces travaux, initiés par des aînés éclairés qui s’inscrivent dans le sillage de ceux de Fanon, Sartre, Foucault, Derrida et Deleuze, suscitent parfois des réactions hostiles de la part du « vieux monde ». ((Je fais allusion à la pétition signée par 80 psychanalystes parue dans le Monde du 25 décembre 2019 contre les études décoloniales dans les universités françaises intitulée : La pensée décoloniale renforce le narcissisme des petites différences, pétition à laquelle 150 psychanalystes ont répondu dans une autre tribune parue dans Libération datée du 3 octobre 2019 pour défendre les travaux incriminés et intitulée: Panique décoloniale chez les psychanalystes.)), mais le mouvement est lancé, les études s’engagent, les publications abondent et les films se réalisent. Ces études ne viennent pas de l’étranger comme certains l’affirment, leurs origines sont françaises, notre pays a trop longtemps ignoré ou refusé de considérer les travaux de Mannoni, Fanon, Césaire ou Glissant. Notre pays est resté trop longtemps à l’écart des recherches qui se sont poursuivies sur ces thèmes dans les pays Anglo-saxons. Il est temps de s’interroger sur cette absence, il est temps penser l’histoire de la colonisation dans l’actuel. Penser le passé comme ce qui se rejoue dans le présent, c’est bien ce qui occupe la psychanalyse comme pratique de la parole. Il faut « Ouvrir la voie ». Ne nous trompons pas sur la visée de ces travaux, il y aura des disputes, des conflits et parfois même quelques outrances, mais c’est bien d’une libération dont il s’agit. Continuons de penser, de réfléchir, de lire, de voir des films sur le colonialisme, la race et l’esclavage pour que la parole se libère et surtout, qu’elle soit entendue.
On reconnaît un grand film à la qualité de mise en scène et au style de son auteur, sans doute, mais aussi au regard qu’il porte sur le monde et au fait que l’évènement qu’il présente n’est plus le même avant et après la projection. La bataille d’Alger est un grand film. Aujourd’hui, après tant d’années de silence et de censure, il est enfin possible de dire et d’écrire à propos de Pontecorvo que celui qui a eu la force, la clairvoyance et le courage de mettre en scène La Bataille d’Alger, cet homme-là, contrairement à ce qu’affirmait Rivette, mérite notre respect et notre admiration.