Arrête ou je continue
Sophie Fillières
Avec Emmanuelle Devos (Pomme), Mathieu Amalric (Pierre), Josephine de La Baume (Mellie)
Où trouver ce film ?
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L'intrigue
Pomme et Pierre partent se promener en randonnée. Quelque chose ne fonctionne plus entre eux. Ils se disputent. Pomme s’en va seule dans la forêt et Pierre ne la suit pas. Plusieurs jours passent. Quand ils se retrouvent, Pomme constate qu’ils sont séparés.
Photos et vidéos extraites du film
«Le dieu manque à l’autel où je suis la victime...»
Publié le par Pascal Laëthier
Le nouvel opus de Sophie Fillières se situe dans la suite de deux de ses trois films précédents : « Aïe » (2000) et « Gentille » (2005), encore plus à l’épure, plus assuré, plus déterminé et tout aussi formidable. Filllières se pose, fait moins de concession au spectaculaire et à l’anecdotique. Elle est plus concentrée, plus essentielle et plus silencieuse aussi. Elle raconte l’histoire d’une femme que son fils laisse et qui se sépare de son mari. Dans un style à la fois réaliste et décalé, comme elle sait faire, elle montre le plus étrange et le plus simple de la relation humaine. A travers le récit drolatique des mésaventures conjugales de Pierre et Pomme, Fillières s’interroge sur ce que c’est qu’être avec l’autre. Dans le couple, bien sûr, mais pas uniquement. Dans « Arrête ou je continue », c’est Pomme, le personnage interprété par Emmanuelle Devos, qui mène le jeu, Pierre (Mathieu Amalric) suit, ou plutôt subit l’affaire : « Si Pomme est enfermée au sein du couple, elle n’est pas névrosée, elle n’est pas fragile psychologiquement. Elle a été attaquée physiquement, se retrouve en arrêt maladie après une opération d’une tumeur bénigne au cerveau, mais elle est saine, équilibrée, juste saisie d’épouvante devant ce que les choses sont devenues entre elle et Pierre. Il y a une sorte de hantise à s’accrocher l’un à l’autre au-dessus d’un vide creusé par leur conjugalité »1
Sans doute, Pomme n’est pas névrosée, mais Pierre lui, est terriblement empêché. Il est diablement empêtré dans son rapport au désir au point de ne jamais répondre à la question qu’on lui pose. Il ne sait pas ce qu’il veut au point d’en devenir une sorte d’ectoplasme.
D’une manière plus générale, Fillières interroge notre manière « d’être à deux ». On ne sait pas trop à quoi ça tient, un couple aujourd’hui, une fois débarrassée des contraintes qui justifiait son existence d’autrefois (l’argent, la parentalité, la morale, l’entourage, l’habitude….) C’est une affaire de désir direz-vous… Oui, mais justement… La belle affaire. Le désir est fragile, évanescent et impossible à satisfaire. Pierre manque à l’appel (apple). Pomme le constate et va de l’avant. C’est de son absence que nait autre chose. Une découverte ? Une avancée ? Une régression ? Une rencontre avec la forêt ? La nature ? Elle-même ?
Gérard de Nerval dans le Christ aux oliviers décrit l’errance d’un homme seul et désespéré, abandonné de tous, que le doute assaille.
« Mes amis, savez-vous la nouvelle ?
J’ai touché de mon front à la voute éternelle ;
Je suis sanglant, brisé, souffrant pour bien des jours !
Frères, je vous trompais : Abîme ! abîme ! abîme !
Le dieu manque à l’autel où je suis la victime…
Dieu n’est pas ! Dieu n’est plus ! » Mais ils dormaient toujours !… »
- Extrait de l’interview de Sophie Fillières dans le dossier de presse du film. [↩]