Zelig

Woody Allen

Avec Mia Farrow (Eudora Fletcher), Woody Allen (Léonard Zelig)

Noir et blanc - 1983 - DVD

L'intrigue

« Zelig » est un faux documentaire réalisé avec des images d’archives truquées qui retrace la vie de Léornard Zelig et de son médecin traitant, Eudora Fletcher. Celui que l’on appelait l’homme caméléon a vécu aux USA au début du 20ième siècle. Il est frappé d’une maladie étrange, il change son apparence et sa personnalité en fonction du milieu dans lequel il est plongé. C’est ainsi qu’il devient tour à tour médecin, noir, rabin, gros, indien et nazi…

  • Mia Farrow (Eudora Fletcher) et Woody Allen (Léonard Zelig)

  • Woody Allen (Zelig)

  • Woody Allen (Zelig)

  • Woody Allen (Zelig et ses médecins)

  • Woody Allen

  • Affiche: Zelig

  • Affiche: Zelig

Identifications

Il nous arrive de partager, d’adhérer ou de communier « comme un seul homme » à la vision d’un film, au discours d’un chef ou plus largement à une idée ou une idéologie. Une fois que la fascination s’estompe, que la communion cesse et que nous nous retrouvons seul, nous nous interrogeons sur cet étrange phénomène de captation qui pour un temps (quelques secondes, quelques heures ou quelques années), nous a ravis à nous-même. C’est ce phénomène que Freud baptise du nom d’identification (hystérique).

Le film « Zelig » présente le cas d’un patient imaginaire sujet à d’incessantes indentifications et qui a la capacité de devenir un autre. Le phénomène est poussé à son paroxisme chez Zelig, puisque non seulement il devient l’autre dans la réalité, mais il n’arrive pas à être autre chose que l’autre. Le film « Zelig » est lui aussi contaminé par son objet puisque cette fiction se présente sous la forme d’un documentaire.

« Zelig » (le film) est un objet non conforme, une « fable burlesque » qui prête à toutes les interprétations. Zelig (le personnage), est-il l’archétype de l’homme moderne américain dont la  se dissout dans son désir d’adaptation? Représente-il la métaphore de l’impossible assimilation des juifs par la société américaine ? Ne serait-ce pas Woddy Allen lui-même qui se cherche dans la contemplation narcissique de son image ?

« Zelig » a nécessité des moyens importants et trois ans de travail pour un résultat qui n’est plus aussi spectaculaire qu’en 1983 puisque le genre dans lequel Woody Allen innovait, le détournement d’archives, a été abondamment copié depuis et facilité grâce aux moyens qu’offre aujourd’hui la technique. Zelig reste un film original. Woody Allen réalise un « Citizen Kane » comique, un pastiche de documentaire d’une extrême sophistication formelle. Il respecte strictement les codes du documentaire télévisuel et utilise une voix off, des images d’archives truquées ou recrées, une musique d’époque, des extraits de reportage en son direct qui alternent avec des interviews actuel de témoins qui racontent le Zelig qu’ils ont connu dans les années trente. On a ainsi le plaisir de voir Bruno Bettelheim, lui-même, définir Zelig comme un cas de normalité extrême.

Document

Dans la pièce de Plaute, puis dans celle de Molière, intitulée Amphitryon, Sosie, le valet d’Amphitryon, rencontre son sosie devant la porte de la maison de son maître. Il s’agit en fait du dieu Mercure qui vient de séduire Alcmène, la femme d’Amphitryon et qui a pris l’apparence de son valet. Pour Sosie, face à lui-même, la confusion est totale. Lacan dans la séance 21 du 8 juin 1955, du séminaire sur le moi (( Jacques Lacan, Texte établi par JACQUES-ALAIN MILLER, Le moi dans la théorie de Freud et dans la technique de la psychanalyse, Paris, éditions du Seuil, Coll. Le champ freudien, 1978, 308 de Jacques Alain Miller, édité au Seuil, collection : « Le Champ freudien ». La version proposée est un mélange des deux. )) compare Sosie, au « moi ».

Cet extrait du séminaire de Jacques Lacan, est la version « Staferla », disponible sur http://staferla.free.fr/ p 707,

« Jamais Sosie ne parviendra à se faire entendre d’Alcmène, parce que la nature même du moi, son rapport fondamental au monde est de trouver toujours en face de lui, son reflet qui comme tel, le dépossède de tout ce qu’il peut songer à atteindre de lui-même. En tant qu’il est moi, il rencontre cette sorte d’ombre, de reflet d’image qui est à la fois le rival, le maître, l’esclave à l’occasion si l’on veut, mais assurément quelque chose qui le sépare de ce dont il s’agit, à savoir la reconnaissance du désir comme tel ».