Bobby Deerfield

Sydney Pollack

Avec Marthe Keller, (Lilian Romelli) Al Pacino , Anny Duperey (Lydia)

Couleurs - 1977 - DVD

L'intrigue

Un coureur automobile célèbre rencontre une jeune femme insouciante atteinte d’un mal incurable.

  • Al Pacino (Booby Deerfield) et Marthe Keller, (Lilian Romelli)

  • Marthe Keller, (Lilian Romelli) et Al Pacino (Booby Deerfield)

  • Marthe Keller, (Lilian Romelli) et Al Pacino (Booby Deerfield)

  • Marthe Keller, (Lilian Romelli)

  • Anny Duperey (Lydia)

  • Al Pacino (Booby Deerfield) et Marthe Keller, (Lilian Romelli)

  • Al Pacino (Booby Deerfield)

  • Anny Duperey (Lydia) et Al Pacino (Booby Deerfield)

  • L'accident

  • Al Pacino (Booby Deerfield) et Marthe Keller, (Lilian Romelli)

  • Al Pacino (Booby Deerfield) et Sydney Pollack

  • Affiche: Bobby Deerfield

  • DVD : Bobby Deerfield

  • Barbara Stanwyck

  • DVD: L'orchidée blanche

La vie, l'amour, la mort, etc.

Sydney Pollack, réalisateur américain, a mis en scène de grands succès populaires, « Tootsie » (1982), « La firme » (1983), « Out of Africa » (1985). « Bobby Deerfield » est le film le plus emblématique de sa méthode, mais c’est aussi le moins remarqué. De ce film Pollack a dit qu’il était « très personnel, peut être le plus personnel de tous » (( Jean-Pierre COURSODON et Bertrand TAVERNIER, « 50 ans de cinéma américain », Paris, Col Omnibus, Nathan, p 774 )).
Pour la préparation et le tournage de ses films, Pollack a mis au point une technique bien rodée, il procède par tâtonnement, il utilise plusieurs scénaristes qui souvent reprennent le travail de celui qui a précédé et il commence le tournage sans script achevé. «  Il est clair qu’une telle constance dans la pratique ne relève pas du hasard mais procède d’une méthode. Peut être instinctive, mais assurément fructueuse. Procédant par approximation et par approximations successives, Pollack finit par définir une vision et faire œuvre d’auteur. (…) Pollack craint tellement d’être didactique (c’est tout à son honneur) qu’il tend systématiquement à laisser la psychologie dans l’ombre. Il déteste expliquer ses personnages. (…) Ces héros laconiques et lointains (…) restent des mystères au moins partiels. C’est à nous qu’il nous appartient de les déchiffrer, à partir de comportements évasifs, de propos obliques » (( Jean-Pierre COURSODON et Bertrand TAVERNIER, « 50 ans de cinéma américain », Paris, Col Omnibus, Nathan, P 772 )). A propos de « Bobby Deerfield », Lourcelles écrit : « Le film reflète la contradiction féconde sur laquelle repose la meilleur part de l’œuvre de Pollack : une énergie, une vitalité souvent étonnante de conteur et de dramaturge sont liés chez lui à une obsession de la dégradation et de la mort. » (( Jacques LOURCELLES, « dictionnaire du cinéma », Paris, Col. Bouquin, Robert Laffont, page 1072 )). Le scénario est construit sur le canevas conventionnel de la rencontre fortuite entre un obsessionnel empêché et une hystérique imprévisible. Il est donc forcément question de mort et de désir impossible. L’originalité du film réside dans la manière brillante et inventive dont Pollack donne chair à cette affaire : l’héros ne cesse d’interroger celle qu’il aime sur un passé qu’elle refuse d’affronter. Elle lui cache sa maladie qui, une fois découverte, exacerbe son amour, un amour qui n’a de valeur que parce qu’il est sans issue. Le casting, improbable, ajoute à l’étrange : Al Pacino, incarne un Américain du New Jersey qui rencontre Marthe Keller, une Italienne du Nord. Les situations et les dialogues sont l’occasion de réflexions philosophiques à la fois abyssales et superficielles sur le but de la vie et sens de la mort que le philosophe américain Emerson n’aurait pas reniées.
« Bobby Deerfield » est l’adaptation d’un roman écrit par Erich Maria Remarque, (( Erich Maria Remarque est l’auteur de « A l’Ouest rien de nouveau » )), qui s’intitule « Le ciel n’a pas de préférés » et publié en 1961. L’intrigue, la rencontre fortuite entre une pianiste gravement malade et d’un pilote de course automobile, avait déjà fait l’objet d’un précédent roman non publié de Remarque dans les années quarante et qui avait été adapté au cinéma par De Toth sous le titre « L’orchidée blanche » (1947). La confrontation des deux adaptations n’a pas qu’un intérêt cinéphilique, elle permet de comparer deux visions du monde; celle de De Toth, Hongrois ayant fuit le nazisme, est profondément européenne, il s’attarde à explorer en noir et blanc les méandres d’une aventure romantique, mais opaque, dont il préserve le mystère et la complexité, tandis que la mise en scène de Pollack, américaine, puritaine et pragmatique, expose au grand jour grand jour cette histoire d’amour et de mort, fascinée par les impasses qu’elle révèle.
Le film fut mal reçu et le public ne fut pas au rendez-vous. « Bobby Deerfield » est un film emblématique de la fin des années soixante-dix, époque ou les cinéastes américains, fascinés par l’Europe et son cinéma, expérimentent et sont à la recherche de formes de récits originales et audacieuses. Les années quatre-vingt avec l’élection de Ronald Reagan, le retour aux valeurs conservatrices, la recherche de toujours plus de succès, de fréquentation et de marges financières sonneront le glas de ces expériences qui tentaient d’allier cinéma populaire et recherches formelles.